30 mai 2022

Polarisation

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Il est des débats dont on n’entend jamais parler. Des débats très codifiés qui n’ont lieu qu’entre fervents d’une même marque, par exemple. Si vous n’en êtes pas acheteurs, vous voilà aussitôt exclus. Ainsi, qui a observé la forme de la calandre de la nouvelle BMW 7, suite à son denier « facelift » ? Une calandre encore plus large, encore plus haute, désormais en forme de double haricot. Une opération esthétique qui n’a laissé aucun fan de la marque indifférent. Pour preuves, les messages postés sur les réseaux qui crient à l’horreur, à la honte, à l’infamie. Indigne de la marque munichoise, à les entendre.

A plusieurs reprises, le directeur du design a pris la parole pour justifier ses choix. S’il a bien confirmé qu’il était conscient que, de plus en plus de personnes trouvent ses modèles laids, il en retire néanmoins une certaine fierté en affirmant simultanément que les BMW sont principalement achetées par des personnes dites expressives qui veulent se démarquer. Adieu, donc, la marque sobre, chic et de « bon goût ». Vive la polarisation car, selon ses dires, les clients de la marque aiment se distinguer de la foule et, de préférence, en choquant. Et de préciser que cette nouvelle calandre ne s’adressera finalement qu’à un tiers d’entre eux, soit les acheteurs de modèles hauts de gamme comme le X6, le X7 et les différentes versions de la série 7.

La radicalité de l’affirmation en dit long sur les motivations des acheteurs de luxe et sur la manière dont ce qui leur est destiné doit être désormais conçu. Elle pourrait aussi se tenir à propos de la dernière collection de montres Tambour signées Vuitton dont l’épaisseur, la taille et le côté démonstratif du cadran sont aux antipodes des codes habituels de l’élégance qui servent de références dans l’univers. A côté d’une Tambour, les Rolex passent pour des modèles de sobriété. Certains lisent cette évolution comme un des effets collatéraux de la mondialisation qui obligerait à prendre en compte des goûts (très) éloignés de ceux de l’establishment européen. D’autres y voient le signe d’un désir d’affirmation de sa réussite propre à une nouvelle génération. Mais chacun peut s’accorder sur l’absolue nécessité de ne pas lire le monde à travers la seule lunette du beau et du laid. Sous peine de ne plus rien voir.

Une des missions des marques ne devient-elle pas de casser les codes esthétiques de leur marché ? Il fut un temps où toutes les marques se copiaient…
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