Retour

Voyages intersectoriels

Le 8 septembre dernier, Prada et Adidas présentaient le fruit de leur collaboration sous la forme d’une paire de basket, le célèbre modèle Superstar décliné pour l’occasion en trois coloris et proposé au prix de 449,95 euros. Appréciez la précision. Pour information, la même paire estampillée Adidas s’acquière habituellement pour 99,95 euros. Personne ne s’en étonne, tant il est devenu normal pour une marque de luxe de tendre la main à ce que l’on appelait, hier, un équipementier sportif et, désormais, une marque « lifestyle ».

La singularité de cette ultime collab’ tient à ce que la paire signée Prada ressemble point pour point au modèle original. Ni effets de styles, ni dessins, ni graffitis d’artistes branchés, ni design inédit qui viendraient « réinterpréter une forme iconique » ou « ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire de la marque », pas même de logo en majeur. Seules la qualité des matériaux utilisés (cuir de veau, semelle légère, coutures renforcées) et une discrète signature dorée sur le flanc arrière de la chaussure (Prada-Made in Italy, imprimé à chaud) viennent satisfaire la curiosité d’un œil expert. Quatre mots pour faire la différence. Difficile de faire plus discrètement ostentatoire.

Le destin de la mode est habituellement top-down puisque ce sont les modèles des marques haut de gamme qui sont imités ou copiés par d’autres qui les destinent à un public plus large, moins exigeant, mais en quête des mêmes signes de reconnaissance. Ici, la logique s’inverse. La référence est street et l’aboutissement, couture, une démarche encore rare (la célèbre Stan Smith, le sac Tati ou la marque Supreme y sont déjà passés) qui pourrait se développer et constituer un nouveau moteur pour les marques de luxe : décalée voire ironique et un peu provocatrice, cette logique n’a-t-elle pas tout pour séduire les millennials, leur nouvelle cible officielle ?

Top-down ou bottom-up (du bas vers le haut), ces voyages intersectoriels viennent confirmer la place prise par les signes dans notre société et, plus particulièrement, par la forme. Quel que soit le secteur, c’est toujours un petit nombre de produits iconiques (des « forme-signes») qui est recherché par les consommateurs, charge ensuite à chaque marque de les faire entrer dans leurs univers et de les interpréter à partir de leurs savoir-faire et répondre ainsi au désir de chacun. Décliner un produit ce n’est pas seulement multiplier les formats ou les variétés. C’est aussi savoir aller ailleurs.

So What ?

Dans le secteur alimentaire aussi les produits iconiques sont répliqués par les MDD. Pourquoi ne pas inverser la logique et imaginer des Chocos BN, Petit-Beurre, Tuc ou Apéricubes revisités par des chefs ?

Contactez-nous

Vous aimerez aussi