11 septembre 2023

Le temps des TPV

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Depuis le temps que les experts et gourous de tous poils nous disent que nous devons ralentir si nous ne voulons pas périr, il fallait bien que cela se traduise. Certes, cela fait plusieurs années que l’on parle de slow life, de slow tourisme et de slow fashion mais ils ne dépassaient guère les frontières des pages Tendances des féminins qui en profitaient pour les associer à d’impératifs styles de vie. Cette fois, c’est concret et plutôt inattendu : la SNCF a annoncé vouloir lancer, dès la fin de l’année, des trains lents. Des TPV (Train à Petite Vitesse) après des années de TGV. Pas de doute, le monde d’aujourd’hui ne ressemble pas au monde d’avant.

Après les essais concluants de Paris-Nantes et de Paris-Lyon à petite vitesse, voici que s’annoncent donc les Paris-Bruxelles, les Paris-Rennes et les Paris-Bordeaux en trains Corail (la modernité des années 70) repackagés. L’économie circulaire en mode ferroviaire. Le vintage érigé en mode de vie. Un nouveau marché s’ouvre ainsi, entre les TER, les Ouigos et les Flixbus, manière de nous rappeler que le marketing est bien l’art de s’installer dans les interstices. Mais avec les TPV, « moins vite » ne devient pas seulement synonyme de « moins cher » (toujours bienvenu en cette période de tension budgétaire) mais aussi de moindre confort. Pour preuve, l’absence de voitures de première. Comme si le renoncement à la vitesse entrainait l’abolition des classes et donc une forme de déclassement.

La décision en dit long sur la manière dont la SNCF envisage les offres économiques : comme une punition, alors qu’elles pourraient se présenter comme la vitrine d’une autre manière de vivre et de consommer. Comment la décroissance pourrait-elle être séduisante si elle demeure associée à la privation ? Surtout quand gagner du temps n’est plus nécessairement un impératif. Car si nos emplois du temps n’ont pas varié, notre rapport au temps, lui, n’est plus le même depuis la généralisation du télétravail. Le temps est-il toujours aussi prioritaire quand nous pouvons choisir où nous travaillons et, ainsi, adapter notre travail à nos loisirs ? 

Pensons à l’Orient Express pour nous souvenir que lenteur ne rime pas toujours avec privation et que nous pourrions, nous aussi, profiter pleinement du temps de transport des TPV pour jouir d’un temps finalement moins perdu que gagné si les conditions s’y prêtaient.

Plutôt qu’à une solution purement économique, les voyages plus lents pourraient pertinemment être associés à une nouvelle poétique du voyage. Pourquoi ralentir sa consommation signifierait-il toujours perdre quelque chose ?
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