23 juillet 2018

Muséification

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Notre société avance en agitant les contraires. D’un côté, la modernité connectée. De l’autre, la tentation de la déconnexion. D’un côté, le fooding pour sa dimension expérimentale. De l’autre, les brasseries à la papa avec leurs œufs mayo, leur blanquette de veau et leur crème caramel comme doudous rassurants. Les voici donc de retour, les brasseries, repeintes au goût du jour, réponses à notre désir de « vrai » et à notre quête permanente d’authenticité.

Pour preuve, le rachat récent de La Poule au Pot, véritable institution des Halles, par le chef étoilé Jean François Piège, et le succès, qui ne faillit pas, du Bouillon Pigalle, néo-brasserie sans réservation et aux tables à touche-touche, inspirée des établissements où l’ambiance et le décor étaient aussi importants que l’assiette. Sans compter l’usage à tout va du mot « bistrot », devenu un véritable label de convivialité. Le temps des décors d’après-guerre et des loufiats aux tabliers noirs qui donnaient aux films de Sautet ce charme so frenchy que tous nous enviaient serait ainsi de nouveau « inspirant ». Pourquoi pas ?

On les a toujours connus ces établissements qui faisaient la réputation de la capitale. Même si on les fréquentait peu car, sans doute, à nos yeux un peu trop «couleur locale» et destinés aux touristes comme la Tour Eiffel et le Château de Versailles. Certains déploreront ce retour de la sagesse et la disparition d’un certain esprit d’innovation culinaire après des années d’expérimentation dans tous les sens (qui se souvient encore de la cuisine moléculaire ?). D’autres, verront là, soit la confirmation de la muséification de la capitale (que faire pour l’empêcher ?), soit la conséquence d’un trop plein de tables conceptuelles aux menus abscons et assez rapidement qualifiées de bistronomiques dès lorsqu’elles avaient envoyé valdinguer les nappes, qu’elles proposaient des vins naturels et que les serveurs se prenaient pour des hipsters.

Mais, finalement, le plus étonnant ici n’est-il pas de croiser dans ces néo-brasseries une clientèle jeune et urbaine, celle que l’on s’obstine à toujours voir comme éprise de modernité et animée par le désir de rompre avec l’existant ?

Puisque la capitale se muséifie, pourquoi ne pas la confier, le temps d’un été, à ceux qui veulent la voir comme elle est dans leurs rêves ? Le billet du lundi quitte Paris et sera de retour le 5 septembre !
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